Je suis ARM,
Ce sigle un peu barbare désigne les Assistants de Régulation Médicale. Notre ancien nom : les permanenciers. Nous sommes des agents hospitaliers au service du public.
Nous travaillons dans un SAMU ( Service d’Aide Médicale Urgente), et, comme les urgences, nous traitons de plus en plus d’appels, même ceux qui ne sont pas urgents, du plus petit bobo à la détresse vitale.
C’est le SAMU qui envoie le SMUR (Service Mobile d’Urgence et de Réanimation).
Nous assurons l’écoute permanente au centre 15 ou 112 , le jour comme la nuit , 7/7…
Je travaille, en plus de jours dans la semaine, un weekend sur 2 si tout va bien ( mais 3 en règle générale avec les arrêts, les effectifs minimum….), plus les fériés, je travaille les nuits.
Les horaires de travail ( nuit ou jour ) sont, en règle générale, en 12 h.
Les « Assistants de Régulation Médicale » se trouvent être le premier contact, arrivent à absorber les cris, la peur panique, la douleur de l’appelant et qui, malgré cela, parviennent à obtenir l’adresse de l’accident, du malaise, et à permettre au témoin de se ressaisir afin d’être réceptif aux conseils du médecin.
Ces mêmes conseils qui parfois sauvent les vies de nos proches. « Nous allons commencer le massage cardiaque, allez et 1 et 2 et 3, ne lâchez rien, je suis avec vous, courage, c’est dur mais ne lâchez rien, je suis là ! « les secours arrivent. »
Mais voilà, je ne peux pas décrocher votre appel d’urgence, je suis déjà au téléphone, avec une personne qui appelle pour la énième fois pour son problème de dos qui dure depuis 2 mois et qui demande a ce que le SMUR ( Service Mobile d’Urgence et de Réanimation ) vienne… !!
Il faut prendre le temps ( à nouveau) de lui expliquer que ce n’est pas la réponse adaptée à sa situation, qu’il faut voir avec son médecin de famille ou habituel… et elle ne comprend pas …. ou je suis en train de me faire insulter par une personne en ébriété qui veut qu’on vienne le chercher car il fait un coma éthylique ( mais il vous parle…), la piqûre de moustique qui démange, …. nous recevons quantité d’appels et les exemples ne manquent pas. Mais, pendant ce temps ( si précieux dans notre métier) je n’ai pas décroché votre appel…. !
Et quand je le décroche, il faut que ce soit comme si c’était le premier, être frais et disponible comme à la première minute de ma prise de poste. Il faut que je détermine l’urgence ( relative, absolue, ressentie car, pour certains, une gastro est urgente…), que je localise le lieu, l’identité et l’âge ( qui sont importants pour des raisons médicales), tout ça en moins d’une minute… , que je passe l’appel au médecin régulateur et, si il est déjà en ligne, ( car seul médecin à réguler), … par exemple pour réexpliquer a la personne qui a mal au dos ce qu’elle doit faire.., et bien il faut que j’envoie des secours, que je fasse faire un massage cardiaque, tout ça en rassurant l’appelant , en gérant son stress et le mien !
L’appel peut concerner, un homme, une femme, un enfant, qu’il soit jeune, moins jeune, ou âgé. Cela peut être vous, moi, un ami, une sœur, un frère, une mère, un père, un enfant peu importe, il faut sauver cette personne ! Souvent on y arrive, dés fois pas !
Tout le monde retiendra notre échec, se permettra de faire du « SAMU bashing » … c’est à la mode, mais aucun article de presse quand nous réussissons !
Je dois l’avouer, que ça fait toujours du bien un petit mot car, il se créé un lien pendant ce court moment intense que nous avons partagé.
Au moment ou j’écris ces lignes, je vois la photo de cette petite fille sur son lit d’hôpital, en vie, souriante, le pouce levé avec ce petit mot : « merci » ! c’est peu et tellement à la fois.
Cette petite fille était en arrêt cardio-respiratoire quand son papa nous avait appelé, la rapidité de notre action à été cruciale. Ce n’est pas de l’immodestie de ma part mais c’est simplement pour ( essayer ) de vous expliquer ce beau métier que j’exerce, en peu de mots.
Il a été mis une nouvelle fois en avant sur la scène médiatique récemment, de façon terrible !
Nous sommes des humains qui traitons de l’humain dans toute sa complexité.
Nous avons un métier à risque nous le savons.
L’erreur est humaine mais les nôtres se paient chères. Notre sanction est morale et durable, parce que notre vocation première est d’essayer de sauver des vies !
Nous ne sommes pas infaillibles et nous faisons de notre mieux pour vous aider.
Nous posons des questions car nous sommes au téléphone, nous devons « imaginer » ce qui se passe avec ce que vous nous dites, alors ne nous insultez pas pour ça.
Nous devons adapter notre réponse en fonction du besoin que nécessite votre état ! Et souvent les gens ne comprennent pas la réponse amenée, car ils veulent ça et point ! Des exemples, il y en aurait tellement…trop long !
Vous dire que nous subissons aussi les politiques d’économies dévastatrices en termes de : fermetures de SAMU, absences de médecins généralistes en nuit profonde et nuit tout court ( dés 20h), pas assez d’équipes SMUR ( plus de 50 minutes de route pour l’habitant le plus éloigné de notre secteur ), réduction des secteurs et du nombre d’ambulances disponibles en garde préfectorales ( ambulances privées de garde la nuit, les weekends et jours fériés disponibles pour les missions SAMU) décidées par l’ARS, etc…. il y en a tellement ! Mais vous ne le savez pas …. ou trop tard !
Nous sommes empathiques, patients, curieux, déterminés à vous aider au mieux de nos possibilités et de votre état.Nous pouvons nous montrer directifs dans l’entretien, directs dans nos propos, voir fermes, mais jamais insultants ni méprisants ! Il faut que l’on fasse vite pour décrocher l’appel suivant ! On ne sait jamais ce que ce sera : un rhume, une gastro, un accident grave, un infarctus…. !
Nous subissons les énièmes réformes hospitalières ( service public le plus réformé ) avec les restrictions de coûts, les budgets serrés, le manque de personnel, les heures sups, les plannings chargés, etc.. oh, ce n’est pas une excuse, je vous explique tout du mieux que je puisse.
Bien souvent nous « serrons les fesses » car nous n’avons qu’une ou deux équipes SMUR à envoyer sur les détresses vitales, et, quand on n’en a plus, que l’on a vidé les urgences des 2 seuls médecins présents, ce qui va engorger le service ( la fameuse attente aux urgences), on aimerait une baguette magique pour mettre les décideurs à notre place, ou, à la place de la famille de la personne en train de décéder.
Assez de ces politiques absurdes qui veulent tout quantifier, raisonner en coût.
Si la santé à un coût, doit elle avoir un prix ?
Nous, nous connaissons le prix à payer et il est lourd.
Un ARM