Rencontre AUBENAS – Avril 2008 – Motion

Rencontres de la Coordination Nationale
AUBENAS – Avril 2008

 

Motion

Pour un hôpital de proximité pour toutes et tous, de la naissance à la mort

 

Clamecy,  Lannemezan, Lézignan-Corbières, Ancenis, Carhaix, Champagnole, Luçon, Redon, Valréas, Arcachon, Ivry, Ruffec …  Les fermetures et les nouvelles menaces sur des services hospitaliers tombent et s’accélèrent après les municipales ! Nous sommes face à une aggravation sans précédent de la politique de déstructuration, « de casse », des hôpitaux et maternités de proximité. Nous refusons ce rouleau compresseur qui loin d’améliorer la qualité des soins et la sécurité comme l’idéologie dominante le prétend, exclut ou limite l’accès aux soins d’une frange de plus en plus importante de la population.

Tous les habitants de notre pays, surtout les plus démunis d’entre nous, se voient de plus en plus éloignés des lieux de soins et d’accouchement, et sont de plus en plus soumis à des frais supplémentaires (franchises, déplacements…) sans compter les risques et la perte de temps qui s’accroissent ainsi que les dépenses induites (transports médicalisés…) non évaluées à ce jour.

Les personnes âgées sont évidemment parmi les premières touchées, même si un nombre croissant de nos concitoyens sont aussi concernés par ces décisions. L’allongement de la vie et l’augmentation de la population très âgée qui en résultent, témoins des progrès de notre société, représentent aujourd’hui un véritable défi de santé publique pour notre pays.  Celui-ci a accumulé des retards importants dans les réponses à y apporter tant dans le domaine de la prévention (vieillir oui, mais le mieux possible), qu’en terme de développement des structures de santé et médicosociales, ou d’établissement de nouvelles solidarités.

 

Aujourd’hui, ces questions sont utilisées par ce gouvernement pour justifier les politiques de santé dans ce qu’elles ont de plus régressives. Ainsi, la maladie d’Alzheimer a servi de faire valoir à l’instauration des franchises médicales !

Il en est de même pour les hôpitaux de proximité. Mme Bachelot et d’autres ne les ferment plus. Ils en font des hôpitaux uniquement dédiés à la prise en charge des personnes âgées, voire accompagnés par les soins de suite. Contre toute intelligence écologique, économique et sanitaire, la rengaine gouvernementale consiste à forcer les gens à se déplacer toujours plus, ou alors à se faire moins soigner pour limiter les coûts : adieu donc prévention et solidarité…

La Coordination Nationale dénonce ces orientations qui sont contraires aux intérêts de toute la population et des personnes âgées plus particulièrement. Elle réaffirme que l’hôpital de proximité doit continuer à répondre aux besoins de santé de toute la population, de la naissance jusqu’à la mort.

 

Pour ce qui concerne la population âgée ou très âgée,  nous refusons de créer des lieux de soins-ghettos. Il ne faut pas scinder nos populations, ni par sexe, ni par groupe ethnique, ni selon le revenu ou l’âge. Bien au contraire, une vraie citoyenneté correspond à la prise en compte de la pluralité. Une personne âgée ne doit pas être coupée du reste de la population, c’est une condition de santé, de vie avec ses diverses motivations, de moral à maintenir…

D’autre part, faire des centres dépouillés de la chirurgie, d’urgences, de soins intensifs… des lieux pour personnes âgées, c’est priver celles-ci de la nécessaire proximité de ces mêmes services, et donc les traiter en citoyens de seconde zone.

La Coordination Nationale alerte sur la transformation des services de soins longue durée en EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), structures médicosociales dont le financement repose sur les usagers et les collectivités territoriales et qui n’ont pas vocation à recevoir des personnes à l’état de santé instable.

Comme pour l’ensemble de la population, la disparition des hôpitaux de proximité a de graves conséquences sur la santé des personnes âgées. L’éloignement géographique s’accompagne d’effets néfastes sur la prévention, l’accès aux soins et entraîne des retards de diagnostics et de traitements, du fait des difficultés de déplacement rencontrées de façon quasi systématique par les très âgés. Ceci conduira très vite à une dégradation  de l’état de santé de la personne âgée, à l’instauration irréversible d’une perte d’autonomie et à l’institutionnalisation qui en découle ou à un accroissement du nombre de décès.

 

Prendre soin des personnes âgées nécessite la prise en compte des facteurs psychologiques et sociaux. L’accompagnement par les proches au cours d’une hospitalisation revêt une dimension essentielle. Des conséquences graves telles que des syndromes confusionnels, des états dépressifs sévères sont à craindre, pour les personnes les plus fragilisées.

L’hospitalisation dans un service de spécialités ou de chirurgie éloigné sera considérée comme potentiellement déstabilisante pour ces personnes. Les médecins hésiteront à poser certaines indications d’hospitalisation ou chirurgicales. Seront ainsi exclues de soins des personnes qui auraient pu en bénéficier dans un hôpital de proximité. La fermeture de services constitue donc un obstacle de plus à la décision médicale pour ces personnes âgées fragilisées.

La tarification à l’activité et ses effets pervers de sélection des malades renforcera  cet état de fait. Elle est responsable d’une fragilisation explosive de la grande majorité des hôpitaux.

Il n’est pas éthiquement acceptable que le critère d’âge devienne limitant pour l’accès aux soins, pas plus qu’il n’est éthiquement acceptable qu’une frange de la population ne puisse accéder aux soins les plus adaptés à ses besoins de santé. La transformation des hôpitaux de proximité en structures de gériatrie isolées ne peut que conduire à cette situation.

La France bénéficiait jusqu’à présent d’un maillage de son territoire par des structures hospitalières, qui peuvent constituer, à condition que les moyens leur en soient donnés, un atout important dans le développement des réponses attendues face au vieillissement de la population.

L’hôpital de proximité est un maillon essentiel des soins aux personnes âgées. Mais pour cela, comme pour l’ensemble de la population, il est indispensable de maintenir ou rétablir plateau technique, urgences, radiologie, chirurgie, psychiatrie et de développer la gériatrie au sein de ces établissements ainsi qu’un travail partenarial avec les structures et professionnels de santé de ville sous forme de réseau gériatrique où prévention et soins seraient indissociables sans aucune discrimination.

 

Le Site Hospitalier Territorial de Proximité, tel que défini par la Coordination Nationale, répondant aux besoins de santé de TOUTE LA POPULATION, comprenant ces différents services, sans oublier la maternité,  reste l’élément indispensable de notre système de soins. Osons rappeler que maintenir un service de maternité auprès d’un centre pour personnes âgées, c’est aussi maintenir des liens humains et sociaux indispensables pour une prise en charge réelle des populations dans toutes leurs dimensions.

 

C’est pourquoi, réunie en Assemblée Générale à Aubenas-Ucel le 6 avril 2008, la Coordination Nationale des Comités de Défense des Hôpitaux et Maternités de Proximité, appelle à faire grandir partout les mobilisations pour s’opposer à la destruction des hôpitaux et maternités de proximité, et au-delà aux atteintes portées à notre système de santé solidaire.

Si on doit évidemment s’occuper des personnes âgées, c’est dans toutes les structures hospitalières qu’il faut le faire ! Si on veut promouvoir une santé respectueuse des besoins réels des populations et des territoires, c’est dans la diversité de l’offre des services sanitaires des hôpitaux de proximité qu’on y arrivera, et non pas en dépouillant les uns : cela n’enrichira pas les autres et encore moins l’offre de soins !

 

Coordination Nationale – avril 2008