COORDINATION NATIONALE DES COMITES
DE DEFENSE DES HOPITAUX ET MATERNITES DE PROXIMITE
9èmes rencontres nationales
IVRY - 27 et 28 octobre 2007
Compte-Rendu du débat du samedi soir
Après une brève introduction de Michel Antony coprésident de la coordination, faisant l'historique de celle-ci, dénonçant les mauvais coups auquel est soumis notre système de santé et affirmant notre volonté de résister, la parole est donnée au Professeur Grimaldi, chef de service à l'hôpital Pitié Salpétrière.
Intervention du Professeur Grimaldi :
1- Comment en est-on arrivé à des régions où le renouvellement des médecins est très compromis ce qui entraîne une surenchère entre régions ?
C'est le résultat d'une politique datant de plus de 20 ans. Il y a 10 ans, on payait des préretraites aux médecins. Nos édiles pensaient qu'en réduisant l'offre de soins on diminuerait la demande, d'où l'instauration du numerus clausus (fixe le nombre de médecins formés par an).
L'égalité d'accès aux soins n'est pas assurée y compris dans les grandes villes. Dans certaines spécialités, même Paris est un désert du fait de la quasi exclusivité de l'accès à ces spécialités en secteur 2.
2- En le justifiant par « le trou de la sécu », le débat sur la santé est un faux débat.
En fait, le déficit est dû à un manque de rentrée : chomage, exonérations de charges...et aussi à une non prise en compte des changements de mode de vie (stress, sédentarisation)
Les besoins de santé augmentent parallélement aux progrès de la santé et donc le trou de la sécu est une victoire de la santé.
Les coûts de santé en France comme en Allemagne représentent 11% du PIB contre 16% aux USA. C'est également moins qu'en Angleterre. 15% du PIB pour la santé est envisageable à très court terme. Ce ne devrait pas être un problème mais ça l'est pour les gouvernants car cette manne échappe aux profits.
Comment résorber ce fameux trou ?
-Philippe Seguin, président de la Cour des Comptes propose de taxer les stocks options. Cela rapporterait 3 milliards d'euros
-L'industrie pharmaceutique dépense 25% en publicité avec ces 23000 visiteurs médicaux. C'est la Sécurité Sociale qui paye. La suppression de ce gaspillage permettrait de récupérer 2 milliards d'euros annuels.
Nous en sommes ainsi déjà à 5 milliards d'euros alors que le déficit de la branche maladie s'élève à 6 milliards d'euros.
3- Comparaison privé-public
Une pompe à insuline maintenant mise en place par des prestataires d'Air Liquide Nestlé coûte 3 fois plus cher qu' à l' Hôpital Public.
La Générale de Santé vient d' acheter l' hôpital de la Croix Rouge. Vitalia avec des fonds d' investissement américains achète à tout va et exige une rentabilité de 20%. On est dans la bulle spéculative. Dans le marché de la santé, la France a un record en Europe avec 23% des équipements privés à secteur lucratif.
Dans ce contexte intervient la T2A (tarification à l' activité) qui s'imposera aux hôpitaux dés 2008. C' est une machine infernale car à la base les codes sont truqués. La convergence public-privé est une pseudo convergence car les missions diffèrent.
Exemple: une sinusite chronique sera traitée en clinique, une tumeur du poumon à l' hôpital.
Une leucémie sera traitée à l' hôpital public avec un code dévalué.
L' hôpital est tenu à une permanence de soins et à la réponse à tous les usagers; il ne peut refuser les pathologies les plus graves et les plus complexes.
Les salaires des médecins hospitaliers entrent dans les budgets des hôpitaux, les honoraires des praticiens en clinique donnent lieu à des honoraires.
Le système de la tarification à l' acte va envoyer 80% des hôpitaux dans le mur. La seule solution sera de restructurer ou de fermer avec les conséquences qu' on connaît.
Les malades devront aller en clinique avec des dépassements d' honoraires ce qui ouvre la porte aux assurances privées..
Le principe de solidarité disparaît.
Un signe, les dirigeants nommés des services de santé viennent maintenant du privé : les AGF, Danone. Les techniques de communication sont utilisées pour diviser syndicats, personnels, usagers.
Ce qui devrait nous rassembler:
-Égalité d' accès aux soins
-Juste soin au juste coût
Intervention du Dr Françoise Nay, Présidente du Comité de défense de Jean Rostand, secrétaire de la coordination
Elle montre la convergence des problèmes d' accès aux soins en milieu urbain et rural.
L'hôpital Jean Rostand est un des rares hôpitaux situé en zone urbaine sensible. La densité en généralistes, spécialistes, structures hospitalières ou médicales est ici inférieure à la densité nationale.Par exemple, on ne compte que 5 sage femmes libérales pour 14 communes sur le Val de Marne ouest.
Le nombre de maternités en Ile de France est inversement proportionnel au nombre de logements sociaux dans les villes !
Sur Ivry et le Val de Marne ouest, malgré les augmentations de population effectives ou prévues, le ministère répond qu' il faut fermer J. Rostand (2300 accouchements par an) alors que ce territoire présente un déficit d'accueil de 4000 naissances annuelles.
Il faut se battre pour une offre de soins dans les villes de banlieue. Il faut se battre contre les franchises et les mesures conduisant à une aggravation de l'inégalité d'accès aux soins.
Intervention du Dr Christophe Prudhomme du SAMU 93, membre de l'AMUF et de la CGT
Le problème est de créer un rapport de force favorable à la défense de la santé. Cela a pu être fait à l' hôpital Avicenne de Bobigny avec les syndicats, les professeurs de médecine, les élus, la population.
Une des missions régaliennes de l' état est l' aménagement du territoire, y compris dans le domaine de la santé. Un gros centre où les patients sont acheminés par hélicoptère n'est pas la solution.
Il faut inventer de nouvelles structures: des maisons de santé avec médecins, kinés, infirmières, hôpital...
La grève des internes généralistes remet en cause la T2A et porte de nouvelles exigences.
En Seine Saint Denis de nombreuses maternités ont fermé dans les années 90. Ceci entraine une augmentation des accouchements à domicile ou une sortie au 2ème jour des accouchées conduisant souvent à des réhospitalisations vers les urgences pédiatriques. Ce n'est pas vraiment la Bonne Médecine.
L'aspect humaniste de la santé devrait passer avant l'argent !
Intervention du Dr Pierre Chevallier, Anesthésiste à l'hôpital de Ste Affrique et membre du CA de la coordination
Après avoir rappelé toutes les luttes, il relate la diffamation dont cet hôpital symbolique a été victime l'été 2007.
Après une évaluation « bizarre » sur 60 dossiers, la presse titre le 19 juillet sur « 6 décés sur 12 à l'hôpital de Ste Affrique ». Une situation humainement extrêmemnt difficile à vivre pour l'ensemble des professionnels de l'hôpital.
La réaction de la population , des élus et des hospitaliers a été très vive. Les hospitaliers ont donné les éléments dans la transparence sur les différents points évoqués. La population a réaffirmé sa confiance à l'hôpital. (cf les éléments sur le site dosier Saint-Affrique)
Malgrè cela, depuis début aout, il n'y a plus de chirurgie lourde à Ste Affrique et l'Agence Régionale d'Hospitalisation n'a toujours pas précisé ce qu'il est possible de faire ou pas comme actes chirurgicaux ...
Intervention d'André LACHARD Coprésident de la coordination
Tout le territoire est touché: Ivry, Pithiviers, Clamecy, Valréas...
Souvent, on ne ferme pas un établissement mais on ne lui donne pas les moyens de fonctionner.La disparition d'un service déséquilibre l'établissement et par effet domino tout disparaitra.
Les élus sont déconsidérés par les Agences Régionales d' Hospitalisation : c'est un déni de démocratie.
Les personnels hospitaliers sont fatigués.
On constate un éloignement des soins et il n'existe pas de moyens de transport adapté
Une riche discussion s'est ensuite engagée avec la salle.